jeudi 4 octobre 2007

Revenir



Aller sur mon image en ligne, l'agrandir, clic droit puis copier l'adresse de l'image, retour sur blogger, la troisième icône en partant de la droite, ajouter une image, coller et envoyer l'image.

Petite routine familière qui a fini par me venir naturellement au long de ces quarante trois messages. Et ce soir je les exécute pour la dernière fois.

Il est temps de refermer ce blog. Une page s'est tournée dans notre vie à tous les quatre. Je m'étonne encore un peu moi-même d'avoir entr'ouvert cette fenêtre qui vous a permis de nous accompagner un peu, mais je ne regrette pas de l'avoir fait. Durant ces six semaines, j'ai fait un peu plus de 2000 photos. 300 sont à peu près potables, et sur ce nombre, une toute petite centaine est pas mal. Il y en a même cinq ou six que j'estime assez réussies. Un ratio acceptable finalement.

Bon, je ne vais pas sortir les violons. Je mentirais en disant que j'ai un pincement au cœur en clôturant ce journal de bord. Il a fait ce pour quoi il était destiné, en le parcourant j'en suis assez content, et maintenant la vie va reprendre ses droits, et sa routine. Écrire fait trop partie de ma vie pour que je m'arrête de le faire, et certains d'entre-vous savent où continuer de me lire.

La photo en revanche a pris une place qu'elle n'avait pas. Six semaines durant, j'ai vécu appareil au poing. Je ne sais combien de temps va s'écouler avant que cela ne me manque. Pas longtemps sans doute. J'ai déjà une ou deux idées.

Je vous remercie de nous avoir lu, et je salue ceux qui ont réagit à ce blog, aussi bien dans leurs commentaires, que par mail ou sur flickr.

Lorsque nous sommes partis de Bogota, une dernière visite à FANA nous a fait voir le bonheur à venir de quelques autres parents. La vie trouve son chemin, quoiqu'il arrive. À ceux qui le peuvent, appartient le devoir d'en témoigner.




En espagnol on ne dit pas "adieu", on dit "suerte" !

lundi 1 octobre 2007

Bogota forever



Ayé ! Enfin sur le départ. Demain à cette même heure nous serons en train de survoler l'Atlantique.

Je mentirais en disant que je ne suis pas content de rentrer. Mais évidemment, il y a le petit pincement au cœur. D'autant plus aigu, que je sais que je ne reviendrai pas en Colombie d'ici à plusieurs années. Or quoiqu'il arrive, la Colombie ne sera plus jamais un pays comme les autres pour nous, et évidemment, Bogota, restera la ville où nous avons laissé un peu de nous même.




On se sent forcément un peu concerné par ce pays. Ce pays qui change si vite.

Rien qu'en trois ans, le temps qu'il nous a fallu pour venir chercher nos deux enfants, Bogota nous a surprise. Et avec elle c'est toute la Colombie.

La violence y est moins, bien moins présente. Plus de gardes armés dans les rues des quartiers bourgeois, moins de patrouilles de voltigeurs à motos. Une tension moins perceptible.




La ville n'est plus dangereuse. Enfin... pas plus que bien des grandes villes de pays réputés plus sûrs. Bien moins que Los Angeles par exemple, et à peine plus que Paris.




C'est certainement le symptôme le plus évident de la politique menée depuis six ans par Alvaro Uribe Velez, le très controversé président réélu de la Colombie. En bientôt deux mandats, il a de nouveau assis le pouvoir central dans des régions jusque là largement livrées à elles-même. Les tensions visibles se sont atténuées, notamment grâce au "désarmement" des paramilitaires.




Par ailleurs, la croissance du pays atteint le niveau record de 8%, et l'argent investit à l'étranger revient vite. Des groupes comme Renault ou Carrefour ont fait de la Colombie l'une de leur priorité.




Oui, le pays va mieux. Mais il reste un pur sang qui marche sur trois pattes. 90% du budget est toujours affecté à l'armée, et 10 soldats tombent chaque jour dans cette guerre qui a presque fini par oublier son nom, mais marque la société toute entière de son empreinte.




Loin d'avoir désarmé, les paramilitaires d'extrême-droite, œuvrent toujours dans l'ombre, sous la bénédiction aveugle de certains proches du président (comme le chef des DAS – les très puissants services secrets colombiens –, contraint de démissionner pour avoir livré aux hommes de main de l'AUC, le nom de plusieurs syndicalistes gênants). Des départements, comme le Valle del Cauca, sont toujours le théâtre de luttes armées particulièrement sanglantes entre l'armée, les paramilitaires, deux gangs de narcos et les FARC. Onze députés viennent d'ailleurs de le payer de leurs vies.

La drogue est toujours partie intégrante de l'économie locale. La corruption, même si elle a énormément diminué, reste la norme dans certains coins du pays.




La croissance galopante accentue la paupérisation d'une classe moyenne timide, mais presque unique sur le continent sud-américain. Les écarts de richesse, moins patents ici à Bogota, sont choquants pour les Occidentaux que nous sommes. L'éducation de qualité reste un privilège, et le népotisme des classes dirigeantes est digne d'une république bananière.

Cependant, la Colombie reste un phare en Amérique du Sud. Sa situation est enviable, et son rayonnement indéniable. Et plus que tout, il y a ici une réelle volonté d'en finir avec ce qui a donné au pays cette réputation sordide qu'il a de par le monde.




Témoin, cette volonté affichée de l'administration de mieux gérer ses enfants abandonnés. De ne plus avoir à nécessairement les confier à l'adoption internationale.

Quand je reviendrai en Colombie, nul doute qu'elle aura, encore, changé. Quel visage aura ce pays où sont nés mes deux enfants ? Que découvriront-ils alors ? Un pays qui, quoiqu'il arrive restera le leur, puisque toutes leurs vies, ils conserveront la nationalité colombienne.




Pour la deuxième fois, j'ai passé six semaines ici. J'ai tenté de mieux comprendre ce pays, mais je n'ai fait qu'en effleuré la défloration. Il garde sa part de mystères, d'insolite.

Mon séjour s'achève sur le constat d'un demi échec. Je ne connais sans doute pas mieux la Colombie. Ou à peine. Mais j'ai appris à mieux l'aimer. En tout cas, à m'en sentir un peu le droit. Ce que j'estimais devoir à mon fils et ma fille.

Ce post est le dernier que je rédige ici, en terre de contrastes et de paradoxes. J'y laisse un peu de moi, ce qui est bien la moindre des choses si l'on considère ce que je lui dois.




Je ne mettrai un point final à ce blog que là où je l'ai commencé – c'est à dire en France –, mais d'ores et déjà, avant de m'envoler, j'aimerais adresser un salut tout particulier à :

Michelle, pour son amitié, et pour avoir été là, tout le temps.
Annette, qui a fait bien plus que son travail de guide.
Vilma, Rosita, Rosio et Diana, les filles et piliers du Refugio.
Thierry, de l'Ambassade de France à Bogota, pour m'avoir entr'ouvert les portes de sa Colombie.

Je me dois aussi de mentionner la bière Aguila.

Un clin d'œil aux compadres de voyage, Florent et Laurane.

Une pensée pour les Fred, Nathalie, Laurence, Alexandra, Laurent, Eric, Sylvine, Pascale et Grégoire ; la communauté française des adoptants.

Et puis bien entendu, un merci infini à Mercedes, Florangela, Maria Teresa, Marina, Monica, Helena, et tout le monde à FANA. On vous doit plus qu'on ne pourra jamais vous rendre.