mercredi 26 septembre 2007

Rock y Roll



Sortie tardive dans la Zona Rosa (quartier branchouille bourgeouille hyper-sécurisé) pour ne pas me jeter à la gorge de quelqu'un d'ici ce soir et lui déchirer la trachée à coups de canines. La vie en semi-collectivité, la bouffe dégueu de la pension et les soirées devant TV5 Monde, ça va deux minutes, mais là, j'ai l'impression que je suis en train de refaire mon service militaire. À deux doigts de descendre à l'armurerie et de refaire une animation de soirée façon Manson Family.

Objectif : le centre commercial Andino (le lieu le plus sûr de Bogota selon l'ambassade U.S), qui héberge un magasin...




Oui ! Un magasin Tower Records. Je suis conscient de la charge émotionnelle que représente ce logo pour tous ceux qui étaient des habitués des Paris-Londres en bus pourris Eurolines, avec descente obligatoire au Tower Records de Picadilly Circus. C'était évidemment avant qu'il ne soit remplacé par un de ces horribles Virgin Megastore.

Mission : trouver un disque de punk colombien pour égayer la programmation musicale de la Salle 101.

Mission quasi impossible quand on ne connaît pas un minimum le marché local, les FM Bogotanos restant consciencieusement dans les sillons bien rectilignes des sentiers archi-rebattus.

Musarder quelques minutes dans le magasin n'a fait qu'augmenter mon désarroi. Le rayon rock en español n'offrait guère que quelques incongruités numériques (comme les Heroes Del Silencio - feu les Pearljam y crouton) et une poignée de machins qui sont au rock hispano (et au rock tout court) ce que la feta Salakis est à la cuisine grècque, genre Shakira ou Manu Chao. Ma mission aurait sans doute été vouée à l'échec sans l'intervention providentielle de...

... Ricardo !

Il m'est apparu alors qu'il venait manifestement de prendre son service. L'œil un peu dans le vague, je lui baragouine ce que je cherche, et impérial, il me fait "Follow me !". Ricardo a une classe tellement folle qu'elle ne trouve guère son équivalent que dans sa coupe de douille. Alors qu'il déambule dans les rayons tel un Travolta dans la scène d'ouverture de La Fièvre du samedi soir, je le vois saluer un collègue en dégainant négligemment son index et son pouce. Il est chez lui ici, et lorsqu'il m'amène devant le rayon Punk, il me déballe quelques disques comme s'il me faisait les honneurs de sa discothèque perso.

Les pochettes putassières des premiers CD qu'ils me montre m'alarment presque autant que les photos d'ados attardés qui figurent sur leurs dos. J'ai droit à quelques pénibles combo de punk à roulettes, une pelletée de sous Sum 41, sautillant d'une joie débilitante que soutient indéfectiblement une consommation de bière étiquettées "light". Lorsqu'il me fait entendre un groupe de skacore risiblement cloné sur ce qui se fait de pire aux U.S dans un genre dénué d'intérêt, j'ôte le casque de l'écoute et lui demande si il n'a rien de plus dur. Et comme il a la classe Ricardo, il s'en va exhumer un CD avec une pochette cradingue. Une photo surcontrastée et mal détourée d'une petite vieille - croisement improbable entre la grand-mère de Titi et Alan Vega - en perf, qui fait un doigt de la main droite et tient une binouse de la gauche. Le fond d'un bordeau moche est balafré sur le haut de trois lettres : I.R.A. Le titre : Chronique d'une décénnie de merde !

Ça sent bon ton affaire, mon canard ! Je me dirige vers la borne d'écoute, et dès les premières mesures (à peine en place, comme il se doit), que ponctuent une batterie qui sonne comme un carton à chapeau, je sais que j'ai trouvé ce qu'il me fallait. Que dis-je "Que j'ai trouvé !" ? Que Ricardo a trouvé ce qu'il me fallait. Je le regarde. "Si... Muy bien !". Il m'en claque cinq, visiblement heureux d'avoir pu vendre autre chose que la sous-merde ambiante du moment.

Pour faire bonne mesure, je repars aussi avec une compile de 66 de Sergio Mendes, dans laquelle il reprend plusieurs morceaux des Beatles. Ce qui fait aussi plaisir à Ricardo. Tellement, qu'il me donne son feu vert pour un portrait souvenir.




Ne vous avais-je pas dit qu'il avait la classe ?

Donc souvenez-vous. Si vous passez par Bogota : Ricardo rules !



3 commentaires:

Anonyme a dit…

Sois béni toi et tes descendants jusqu'à la 7ème génération !
Maintenant, le VRAI challenge : trouver un CD du groupe chilien de ska-expérimentalo-punkoïdo-politico-core du début des années 90 "ENTREKLLES".
Tu as trois jours.
Va en paix.

Anonyme a dit…

vas y, ramènes donc quelques sonorités colombiennes pour la Guérilla !
Au fait, le croisement entre la Grand Mère de Titi et Alan Vega ? Little Bob serait donc de Bogota ?
Bises à vous 4
Marc O.

Anonyme a dit…

C'est ça que j'veux sur ma tête pour mon Noêl !